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Mais qu’est-ce donc que cette vieille bâtisse sur laquelle le temps a laissé son empreinte à Laroquebrou ? Indélébile, on aperçoit d’ailleurs les styles et courants architecturaux qui se sont succédés et qui ont façonné cette étrange façade au fil des siècles… Propriété initiale d’un riche marchand dénommé Buc, découvrons l’histoire de cette étonnante demeure.

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Il faut remonter au temps où la cité médiévale de Laroquebrou se composait encore d’une enceinte fortifiée avec au sommet sa motte castrale. Rue Damont, là où se trouve la Maison Buc, nous étions donc dans un des faubourgs de la ville. Mais pas n’importe lequel ! En effet, cette rue fut habitée par de riches bourgeois ayant fait fortune dans le commerce entre les XIVe et XVIe siècles. Au croisement de la rue du Negrerieu (alors celle des potiers, tisserands, tanneurs et autres artisans), cette rue Damont bénéficia très tôt d’un emplacement de 1er choix pour la vente d’objets et d’artisanats divers et variés (venant de la rue des artisans ou des provisions amenées via les embarcations sur la rivière Cère).

Les marchands profitaient donc du passage des pèlerins, marcheurs en tout genre, cavaliers de passage et autres villageois et étalaient ainsi sous leurs yeux l’ensemble de leurs marchandises. D’ailleurs, plusieurs maisons de la rue témoignent encore de cette activité si l’on en croit les restes murés des anciennes voûtes marchandes. Plus grandes que la taille d’une porte classique, elles rappellent les échoppes que l’on trouvait alors dans la cité. Ouvertes sur la rue, les marchands pratiquaient ainsi leur commerce en rez-de-chaussée et habitaient dans les étages.

Si vous vous baladez dans cette rue, vous apercevrez d’ailleurs une curiosité : les maisons en encorbellement ! Effectivement, ce débord d’étage en étage correspondait à un agrandissement des maisons sur la hauteur afin de ne pas payer plus d’impôt au niveau de la surface au sol. De plus, cette technique en encorbellement permettait également, grâce à cette avancée, de protéger l’échoppe des intempéries ! Mais revenons-en à notre Maison Buc !

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Située place du Coq Roquais, à la limite de la rue Damont, elle fut donc construite entre la fin du XIIIe siècle et le début du XIVe. Face à elle, l’on devine ses trois grandes arcades, très abîmées, emblématiques de son époque de construction et ayant été vraisemblablement le théâtre du commerce florissant de son propriétaire. Cossue, cette maison en pierre n’a ni colombage ni encorbellement, comparé à ses semblables tout proches. Elle est érigée sur 2 étages et dispose sur sa gauche d’une petite porte d’entrée ogivale. Remaniée plusieurs fois au cours de l’Histoire, sa façade a notamment été percée de fenêtres à meneaux ; bien plus tard classées au XIXe siècle.

Une curiosité se trouve gravée sur sa façade, la voyez-vous ? Un cadran solaire canonial semble jouer à cache-cache avec la végétation qui recouvre durant la belle saison cette étonnante maison. Mais qu’est-ce donc ? La maison Buc a également été celle d’un religieux et ce cadran solaire, dit “de prières”, lui permettait, grâce à ses indications solaires, de ne pas louper les messes importantes de la cité ! Marque lapidaire de petite taille, cet élément est d’autant plus étonnant qu’on le trouvait généralement sur la façade sud des édifices religieux, hors notre maison Buc n’était vraisemblablement que la demeure du religieux en question.

Cerclé, ce style de cadran solaire canonial est en fait l’ancêtre primitif de nos horloge et se divisait de 3 à 12 segments de droites, marquant les temps de prières de la journée : Laudes à l’aurore, Prime première heure du jour (sur la ligne d’horizon du cadran), Tierce troisième heure du jour, Sexte sixième heure du jour (midi), None neuvième heure du jour, Vêpres le soir (sur la ligne d’horizon du cadran), Complies au coucher, Matines ou Vigiles après minuit.

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Sur la façade de la maison, vous apercevrez également le monogramme “IHS” (Iesus Hominum Salvator) ainsi que la date 1594. Notre religieux devait ainsi faire partie de la communauté des “prêtres filleuls” ou “prêtres fils” de la cité de Laroquebrou. Ainsi chaque maison natale d’un des prêtres de cette communauté était signée de ce sigle en signe de distinction. En effet, il fallait être baptisé dans la paroisse pour par la suite faire partie de cette communauté qui assurait une promotion sociale à l’âge adulte. La date, 1594, correspondrait quant à elle à l’année de l’admission du membre dans la communauté.

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Sélectionnée au Loto du Patrimoine soutenu par la mission Stéphane Bern en 2019, la réhabilitation de la maison Buc s’inscrit donc dans les grands travaux de la commune. Les financements apportés par les fonds du Loto du Patrimoine, des dons et autres mécènes, ont permis, sous l’impulsion de la commune de Laroquebrou, de consolider la structure afin qu’elle cesse de s’abîmer. Le projet de réhabilitation, au long terme, serait quant à lui d’aménager un lieu d’exposition éphémère au rez-de-chaussée, un logement au 1er étage et un gîte communal au 2e.

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